Le tableau ci-dessus, « Instruments de musique », est l’oeuvre de Evaristo Baschenis (1617-1677), peintre italien de l’école vénitienne.
Le Requiem de André CAMPRA (1660 – 1744)
André Campra fut considéré, de son vivant, comme un des plus grands compositeurs de son époque.
Il reçut une excellente éducation musicale à la maîtrise de la Cathédrale Saint Sauveur d’Aix-en-Provence, où il fut l’élève du célèbre maître de chapelle Guillaume Poitevin, qui l’encouragea à composer. Une fois ses études terminées, il fut nommé maître de chapelle aux cathédrales de Toulon (1680-1681), d’Arles (1681-1683), de Toulouse (1683-1694) et de Paris (1694-1700).
Durant les années 1700-1722, Campra établit solidement sa réputation de compositeur et de chef d’orchestre, dans le domaine de la musique profane. En 1722, il fut nommé directeur de la musique du prince de Conti, puis enfin sous-maître de la Chapelle Royale de Versailles de 1722 à sa mise à la retraite en 1742, composant et publiant sa musique avec grand succès. Tout en gardant ses fonctions à la cour de Versailles, Campra devint, avec le poste d’Inspecteur de la musique en 1730, un des directeurs de l’Opéra de Paris.
À propos de l’œuvre
Lorsque Campra arrive à Paris, au début de 1694, c’était déjà un compositeur d’âge mûr (34 ans) qui amenait avec lui un nombre important de motets, psaumes et messes, sa production composée lors des postes précédents : Te Deum, De profondis, Beatus vir, etc… Il s’inspira de ces pièces lorsque, un an après sa nomination à la cathédrale N.D de Paris, il dut écrire un service à la mémoire de Monseigneur François de Harlay, archevêque de Paris.
Les compositeurs devaient faire face à de nombreuses commandes, aussi le « recyclage d’idées anciennes » était-il courant, tout l’art du créateur étant justement de donner une seconde chance à un air, une ligne de basse, un sujet de fugue, etc…
Sa musique profane l’inspira également : l’air Lux aeterna, à la Post Communion, est pratiquement identique à l’arietta (petit aria) italienne de la quatrième entrée de son opéra « L’Europe galante »
Campra utilise un texte religieux modifié : au 18ème siècle, l’office des morts ne comporte pas de Dies Irae ni de libera me et l’omission du Benedictus est fréquente.
L’effectif général est divisé en quatre groupes musicaux: le grand chœur, le petit chœur, les solistes et la symphonie, nom donné à la section instrumentale et qui donnera plus tard son nom à une grande forme musicale.
La Messe de Requiem est une œuvre à part dans la production de Campra : on y retrouve une virtuosité et des effets dramatiques caractéristiques du style opératique, parfaitement intégrés à la forme et au style d’une Messe des Morts. Avec ce Requiem, Campra épouse une esthétique qui déplace un peu la musique liturgique de son but initial, pour en faire une véritable musique de concert.
La Messe de Minuit de Marc-Antoine CHARPENTIER (1643 – 1704)
Vouloir tenter une biographie de Marc-Antoine Charpentier n’est pas chose aisée. On ne sait que peu de choses sur ses origines. En revanche, on est certain que son voyage en Italie, ainsi que les leçons qu’il prit auprès du compositeur Giacomo Carissimi, l’inventeur de l’oratorio, modelèrent son style qu’il n’eut de cesse de transposer en France, ces particularités italiennes étant alors considérées comme novatrices.
À son retour d’Italie, il fut invité par Molière, qui venait de rompre sa collaboration avec Lulli, à s’inclure dans les représentations du Théâtre-Français. De leur entente naquirent les comédies Le Mariage forcé et Le Malade imaginaire…
La mort de Molière le mit directement en première ligne dans une rivalité avec Lulli, qui ne souffrait aucune concurrence. Son talent lui permit toutefois d’attirer l’attention de la princesse de Guise, qui fut une mécène fidèle jusqu’à sa mort, ainsi que du duc d’Orléans, pour qui il écrivit un traité de composition et d’accompagnement.
Moins doué que son rival Lulli pour le style dramatique, il réussit particulièrement dans la musique religieuse représentant les 3/5 ᵉ de son œuvre. C’est là que se développa son génie, au service de toutes les formes alors en usage : messes, motets, psaumes, histoires sacrées, oratorios, cantates…
À propos de l’œuvre
Des 11 messes laissées par Charpentier, la Messe de minuit est, sans conteste, la plus connue et la plus enregistrée de nos jours. Elle date de la période 1690-1693, période qui vit également naître la Messe des morts (H7) à 4 voix.
Elle est écrite pour un groupe de solistes, un chœur à 4 parties, un ensemble de cordes également à 4 parties, 2 flûtes et la basse continue.
La réussite de la messe de Noël de Charpentier repose sur l’alliance du sacré et du profane, de la magnificence des savantes polyphonies vocales et de l’ingénuité des mélodies populaires. Comme de nombreux compositeurs de son époque, il a utilisé comme bases mélodiques des noëls, airs populaires qui correspondent plus aux célébrations sincères et naïves d’un peuple de paysans qu’à la mise en musique des fastes de la Capitale. Avec cette messe, Charpentier réalise une œuvre pleine d’esprit et de goût, simple et festive, qui a inspiré de nombreux compositeurs. Noël est prétexte à candeur et émerveillement, l’usage des éléments populaires va dans ce sens, ce qui n’empêche pas Charpentier d’appliquer un système d’écriture savante, où le langage harmonique rejoint le niveau des émotions.